CIRE SACRÉE

 

Extraits de l'article "La cire d'abeille : Une histoire d'amour entre Dieu et les hommes"

dans "L'abeille de France" n° 843

Bien avant l'intervention des cierges, les Romains s'éclairent à l'aide de torches faites de papyrus trempés dans de la cire. Le premier exemple remonte au début du IVe siècle lorsque l'empereur Constantin ordonne d'illuminer toute la ville de Constantinople, la veille de Noël, au moyen de lampes et de bougies de cire.

La peinture à l'encaustique fut très réputéeÉ On mélangeait des cires colorées réduites en poudre à de l'huile ou à du blanc d'oeuf pour appliquer ensuite à la brosse sèche. Un instrument appelé causterium (genre de fer à repasser) était utilisé pour fondre les couleurs. On trouve encore des icônes peintes à l'encaustique au Mont Sinaï.

La cire d'abeille a de tout temps été étroitement associée aux cérémonies.

Une cérémonie (= du cire) , au sens propre du terme, est une fête au cours de laquelle on brûle beaucoup de cire.

Les sorciers ont toujours exploité ses qualités afin de modeler leurs figurines maléfiques.

On appelait céromancie les prédictions obtenues au moyen de cire liquide tombant goutte à goutte dans de l'eau froide. Les différentes formes que prenaient les gouttes de cire en se solidifiant décidaient si le présage était favorable ou non.

Les Turcs, encore, se servaient de la cire pour découvrir l'auteur d'un crime. Ils récitaient des phrases mystérieuses pendant que la cire fondait doucement sur un feu : la forme que prenait la cire fondues de cette manière devant infailliblement faire découvrir le nom du criminel et sa cachette.

Au Ve siècle avant J.C., Hérodote raconte que, pour embaumer leurs morts, les Perses couvrent le corps de cire avant de le mettre en terre. Ceci afin de préserver les cadavres de la corruption mais également afin de ne pas souiller la terre, le feu ou l'eau. Deux siècles plus tard, le Grec Straton parle encore de cette coutume.

Les Assyriens, quant à eux, recouvrent les cadavres de cire pour les plonger ensuite dans du miel.

Les Égyptiens recourent à cette substance pour imprégner les bandelettes servant à envelopper les momies. Remarquons que le mot momie est d'origine persane : il vient du mot moun ou mum, qui signifie cire.

Les patriciens de Rome et d'Athènes faisaient revivre leurs ancêtres grâce aux bustes en cire appelés imagines majorum. Ceux-ci représentaient avec une saisissante vérité le parent défunt. Pour les réaliser, l'artiste céroplaste coulait sur le visage du mort une épaisseur de plâtre, puis, dans le moule ainsi obtenu, versait la cire qui épousait tous les creux et donnait le relief. Ces bustes étaient placés dans l'atrium, lieu de réunion où se trouvaient l'autel et les dieux domestiques, ou dans le tablinium, pièce de cérémonie où le maître de maison recevait. Lorsque ce dernier mourait, ces statues étaient solennellement portées à son convoi funèbre, rangées par ordre chronologique et vêtues d'habits de magistrats.

En plus de ces bustes d'ancêtres, les Grecs et les Romains plaçaient en évidence des sculptures de cires représentant les dieux lares, gardiens du foyer domestique.

Dans toutes les fêtes de Saturne, Bacchus et Cérés, à Rome toujours, on faisait un grand usage de flambeaux et de guirlandes de cire.

Les Égyptiens représentaient leurs divinités sous formes de statuettes de cire et leurs temples abritaient déjà de nombreuses images votives en cire comme plus tard les églises des chrétiens.

C'est ainsi que, en Allemagne, on représente en cire la partie malade du corps dont on désire la guérison puis on place ces ex-voto dans l'église afin d'être exaucé.

Dès les temps les plus anciens, les cierges éclairent les cérémonies religieuses païennes.

Le mot cierge vient du latin cereus, qui signifie en cire.

Au Xlle siècle avant J.C., un papyrus de Ramsès III nous révèle que les paiements effectués au trésor royal pour les sacrifices se composaient de jarres d'encens, de miel, d'huile et de cire.

Les rites institués par Zoroastre au XIe siècle avant J.C. dans l'Iran antique, le culte du dieu du soleil chez les Égyptiens, ou encore la célébration des mystères d'Eleusis, qui avaient lieu en Attique, en l'honneur de Cérès, déesse de moissons, toutes ces cérémonies se déroulaient à la lumière de cierges de cire d'abeille.

Les premiers chrétiens des catacombes s'éclairent ainsi et continuent avec les cierges lorsqu'ils construisent leurs églises.

C'est au lVe siècle, sous l'empereur Constantin, premier empereur chrétien, que les lumières commencent à être employées dans un but rituel ou symbolique; plus tard les églises de Rome et d'Orient font usage de cierges pendant le jour.

Dès lors, la consommation de cire va augmenter graduellement.

C'est encore Constantin qui institue l'usage des lumières aux cortèges de funérailles ainsi que la coutume de placer des cierges allumés autour du corps avant l'ensevelissement ou la crémation.

Dans la ville de Fès, au Maroc, pour l'anniversaire de Mahomet, les écoliers célébraient une fête, portant chacun une torche de cire allumée pouvant peser jusqu'à 15 kilos. Ces torches étaient ornées tout autour de fruits en cire. Allumées de très bonne heure le matin, elles brûlaient jusqu'à l'aube suivante, moment où la fête cessait. Ces festivités étaient très profitables aux maîtres d'école car ils revendaient très cher les restes de cire qui coulaient des torches.

Au Moyen Age, les cierges sont fabriqués par des moines ou des serviteurs de la noblesse, les chandeliers-ciriers ne pouvant faire que des chandelles de suif et des bougies.

Au XVe siècle, l'emploi des cierges devient général. L'industrie des bougies acquiert une telle importance que les fabricants de cierges de Londres obtiennent le droit de former une corporation, celle de la Worshipful Company of Wax Chandlers, dont des documents attestent l'existence dès 1371.

Des statuts très sévères vont désormais réglementer le travail de ces nouvelles corporations.

Le cierge devient le signe du sacré. Il ne doit contenir que de la cire pure d'abeille et la grandeur des mèches est réglementée.

La cierge pascal a été institué au IXe siècle. La veille de Pâques, on bénissait un grand cierge sans mèche, puis on le plaçait sur l'autel. Ce cierge n'était pas destiné à brûler mais à servir de registre car les fêtes mobiles de l'année étaient gravées sur cette colonne de cire.

L'origine du mot bougie est à chercher dans la ville de Bougie, actuellement Bejaia, en Algérie. Dans cette ville, l'industrie de la cire était florissante et l'on en exportait d'énormes quantités.

La cire, la mèche, le feu et l'air représentent la synthèse de tous les éléments de la nature.